La Seconde Guerre mondiale en Iran

 

par Morgan Lotz

 

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Saviez-vous que des réfugiés polonais furent accueillis en Iran ? Que le consul d’Iran à Paris sauva plusieurs milliers de Juifs condamnés à la déportation ? Que ce même consul put compter sur l’aide d’un médecin ouzbèk et d’un avocat mulhousien ? Que des Iraniens s’engagèrent dans l’armée française en 1940 ? L’Histoire de la Seconde Guerre mondiale en Iran est très fortement méconnue en Occident, voire oubliée pour la plupart de ces aspects.

Cet article commencera par présenter un résumé de la Première Guerre mondiale et étudiera brièvement l’évolution politique et historique de l’Iran au cours des années 1920 et 1930 pour mieux comprendre le contexte de la Seconde Guerre mondiale en Iran. Une première partie présentera l’invasion de l’Iran en 1941, une seconde ses aspects les plus méconnus et enfin une troisième présentera la période comprise entre 1942 et 1945.

 

 La Seconde Guerre mondiale en Iran 

 Deuxième partie : Aspects méconnus de la Seconde Guerre mondiale dans l’histoire de l’Iran 

 

  1. Un soldat français nommé Shâpour Bakhtiâr

Né en 1914 dans le village de Shahrekord, à proximité d’Ispahan, Shâpour Bakhtiâr va très tôt tisser des liens avec la France en fréquentant des écoles françaises à Ispahan et à Beyrouth, au Liban, où il poursuit ses études. Titulaire d’un baccalauréat français, il part en 1935 terminer ses études en France, où il vivra finalement onze années.

Au cours de ses années d’études en sciences politiques à la Sorbonne, Shâpour Bakhtiâr découvre les différents courants politiques qui traversent l’Europe dans les années 1930. Etudiant le nationalisme allemand, il se rend à l’invitation d’amis allemands à l’un des rassemblements de Nuremberg où il sera assis à seulement trente mètres d’Adolf Hitler[1]. Cependant, porté par son refus du totalitarisme, il participe aux collectes de fond au profit des Brigades internationales durant la guerre d’Espagne. Il fréquente aussi des personnalités littéraires comme le philosophe Henry Bergson ou le poète Paul Valéry.

En 1939, Shâpour Bakhtiâr épouse Madeleine Hervo, une jeune bretonne avec qui il aura quatre enfants, Guy, Viviane, France et Patrick. Ils divorceront en 1954.

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La famille Bakhtiâr.

Lorsqu’éclate la Seconde Guerre mondiale en Europe, Shâpour Bakhtiâr choisit de s’engager comme volontaire au 30ème régiment d’artillerie d’Orléans plutôt que dans la Légion étrangère. Son unité finira en poste près de la frontière espagnole lorsque sera signé le traité d’armistice le 22 juin 1940. Il sera condamné à 15 jours de prison après en être venu aux mains avec un autre officier français faisant preuve de défaitisme. Ayant effectué ses 18 mois de service dans le corps des officiers, il est démobilisé en 1941. Bakhtiâr rassembla ses souvenirs dans son autobiographie qu’il intitula Ma fidélité et dont nous rapportons un extrait :

« J'étais à Juan-les-Pins lorsque la guerre éclata. On trouve dans la région plus d'oliviers que de baïonnettes et pourtant je pouvais faire mienne la réflexion écrite dans son Journal par André Gide, près d'un an plus tôt : «Aujourd'hui, dès le lever, me ressaisit l'angoisse à contempler l'épais nuage qui s'étend affreusement sur l'Europe, sur l'univers entier... La menace me paraît si pressante qu'il faille être aveugle pour ne la point voir et continuer d'espérer. » […]

Le 3 septembre 1939, la Grande-Bretagne et la France avaient déclaré la guerre à l'Allemagne, ce qui lui avait donné une excuse. J’avais pris ma décision – je savais que je n’étais pas étranger à cette aventure et tout m'indiquait la voie à suivre : je voulais rejoindre l'Armée française en tant que volontaire. Pour cela, je suis allé  à Nice. Personne ne voulait de moi. On m'a répondu : « Vous habitez Paris, alors allez là-bas et débrouillez-vous ! » C'était fantastique : nous venions offrir notre vie pour la Patrie et c'est ainsi qu'on nous traitait !

Discipliné, je suis rentré à Paris, j'ai frappé à toutes les portes. Un beau jour, l'administration militaire m'a fait connaître sa réponse : « Engagez-vous dans la Légion étrangère. »

Cette réponse n’était pour moi pas acceptable. Marié à une Française depuis plus d'un an, étant dans ma cinquième année de séjour en France, diplômé des universités françaises, je pensais avoir le droit d'être assimilé aux Français. Les autorités ont fini par se ranger à mes arguments. Elles m'ont néanmoins fait languir encore de longs mois avant de me convoquer pour un examen médical. J'avais vingt-six ans, j'étais très sportif, le médecin me déclara bon pour le service.

On a qualifié de « drôle de guerre » la période allant de la déclaration de guerre à mai 1940. C'était effectivement une drôle de guerre ; il m'a fallu attendre le mois de mars pour être enfin affecté à Orléans, au 30ème  Régiment d'artillerie. Etant volontaire, j'avais pu choisir mon arme... Je me souviens d'avoir été versé dans la 98e batterie, puis à la 99e. Nous sommes partis à l'entraînement dans un petit village, près d'un vieux moulin, dans une campagne retirée. Un entraînement à la façon d'alors ; nous avions envie, à force de marcher, de retirer nos « godillots » et d'aller pieds nus.

Notre artillerie était décorée du mot avantageux d'« auto-tractée ». Pendant la retraite, nous serons obligés, sur l'ordre du capitaine qui, évidemment, obéissait au colonel du régiment, de brûler trois voitures qui ne pouvaient plus suivre. Elles avaient fait Verdun, elles dataient de 1915. Trente ans pour des voitures, avec l'entretien que cela comporte ! L'armement ne le cédait en rien aux véhicules pour la vétusté. Nous n'étions certainement pas un régiment d'élite, mais les régiments d'élite n'étaient pas mieux lotis. Aucune comparaison avec ce qu'avaient les Allemands, ni avec l'équipement qui sera celui des Américains. Une fois débrouillés, nous avons été envoyés comme troupe de couverture derrière la ligne Maginot. Je n'avais pas terminé mes classes d'élève-officier ; on a considéré opportun de m'affecter tout de suite à la conduite des véhicules. Pour les galons, on devait me les remettre plus tard, ce n'était d'ailleurs pas ce qui m'intéressait. Nous sommes restés cantonnés environ un mois, n'ayant rien à faire, dans une tranquillité désespérante. A droite, la ligne Maginot, à gauche l'armée du général Huntziger. On évoquait régulièrement devant nous les percées auxquelles nous allions procéder dans le dispositif ennemi. Puis, un jour, on nous apprit que nous allions rejoindre un théâtre d'opérations situé à l'autre bout de la France : l'Italie venait de faire son entrée dans la guerre. Trop tard, les Panzerdivisions déferlaient déjà, la limite était indécise entre le repli stratégique et la débandade. Je ne sais pas par quel miracle nous avons un soir échappé aux Allemands. Encerclés dans un bois obscur par une unité ennemie, nous nous croyions prisonniers, mais au petit matin, fait extraordinaire, il n'y avait plus personne. Nous avaient-ils déconsidérés ? Avaient-ils mieux à faire que de s'occuper de nous ? Je n’en connais pas la raison.

Dans ses Mémoires de guerre, de Gaulle cite le cas de troupes françaises qu'ils désarmèrent avant de leur dire : « Prenez la route du sud comme les autres, nous n'avons pas le temps de vous faire prisonniers. » Peut-être étions-nous dans la même situation, à part que le temps, manquant encore davantage, n'avait même pas permis le contact entre eux et nous.

Nous sommes arrivés à Clermont-Ferrand, puis avons obliqué vers l'ouest, non loin de Carcassonne, pour aboutir à Lannemezan où se trouve une gare de triage ; une des voies qui s'en échappent nous a déposés à Tri-sur-Baïse, dans les Pyrénées. Impossible d'aller plus loin, après c'était l'Espagne.

Nous sommes restés dans ce village deux mois, tandis que l'armistice était signé et la ligne de démarcation entre France libre et France occupée mise en place. Deux mois d'un profond ennui ; nous organisions des excursions. J'ai envisagé de passer la frontière pour continuer la lutte ailleurs ; je crois qu'au fond de moi-même je n'y étais pas disposé.

Il y a une chose, en tout cas, dont j'étais sûr, dont je n'ai jamais douté une seconde : la défaite allemande. A l'époque, on plaisantait de l'affirmation du pauvre Reynaud : « Nous vaincrons parce que nous sommes les plus forts. » Eh bien, il disait vrai, cela s'est réalisé plus tard. Mon premier contact avec la prison s'est effectué en France, sous l'uniforme. Je me suis battu avec un camarade défaitiste qui prédisait comme inéluctable la domination définitive de la France, de l'Angleterre par Hitler. J'avais la conviction du contraire. Nous avons écopé de quinze jours d'arrêts chacun. »[2]

Shâpour Bakhtiâr  s’installe alors avec sa famille en Bretagne dans le village de Saint-Nicolas-du-Pélem et vit entre son village et Paris, où il poursuit ses études et transmet le courrier pour le compte de la Résistance. De plus, il met à disposition son appartement parisien afin de cacher un parachutiste américain et manquera plusieurs fois d’être arrêté par la Gestapo.

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Shâpour Bakhtiâr

« Ma démobilisation me permit de rentrer à Paris et de m'inscrire de nouveau à la Sorbonne et à la faculté de droit pour passer deux thèses de doctorat. L'une ne fut jamais terminée, elle était consacrée au « potentiel de l'intellect ». L'autre absorba tous mes soins ; elle avait pour sujet « Les rapports entre le pouvoir politique et la religion dans la société antique ». 

Mon président était Georges Scelle, un socialiste centre gauche, brillant juriste que nous retrouverons comme conseiller de l'Iran dans le litige opposant notre pays à l'Anglo-Iranian Oil Company. Il avait à ses côtés Olivier Martin, dont j'ai déjà parlé, et Lévy-Bruhl, le fils du célèbre sociologue.

Ma vie va se passer alors entre Paris et la Bretagne. J'avais fait la connaissance en 1939 d'une jeune Française qui était devenue ma femme. Au début de l'Occupation, nous avions deux enfants, que je voulus mettre à l'abri des bombardements et des restrictions alimentaires. Cette double condition était remplie par la très petite ville de Saint-Nicolas-du-Pélem, sur la route qui va de Saint-Brieuc à Rostrenen.

« Le diplôme, disait Valéry, est l'ennemi mortel de la culture. » Ce que j'avais fait jusqu'ici avait pour finalité le diplôme, je m'étais astreint à une discipline pour suivre l'itinéraire que les autres avaient suivi pour aboutir à la même fin. Le travail personnel commençait avec la préparation de thèse. Cette période m'a permis de me former réellement et si je sais quelque chose en philosophie et en poésie, voire en droit, c'est de ces années-là que je le tiens.

J'allais fréquemment à Paris pour consulter divers ouvrages ; c'est ainsi que je rencontrai Félix Gaillard, un de mes camarades de Sciences-Po et de la faculté de droit. Il étudiait les finances privées et moi les finances publiques. Félix Gaillard d'Aimé m'a laissé une grande impression. A Sciences-Po, il dominait le reste de la classe par sa distinction et sa façon élégante de s'exprimer. Pour ma dernière conférence, ayant la possibilité de faire lire des textes par un camarade, ce fut lui que je choisis. Il récita de l'Anatole France avec une diction digne de la Comédie-Française. Je ne fus point surpris plus tard de le voir devenir président du Conseil à trente-sept ans et sa mort prématurée m'affecta beaucoup.

Il se trouva que Gaillard s'occupait de Résistance et que Saint-Nicolas-du-Pélem allait devenir un centre de lutte contre l'Occupant. C'était un lien de plus entre nous. Il me demanda si je pouvais lui trouver un ou deux appartements disponibles et absolument sûrs. Je lui en proposai un qui répondait à cette définition, puisqu'il s'agissait du mien, rue de l'Assomption. Je le présentai à la concierge comme un ami qui ne trouvait pas à se loger et dont les parents, vivant en zone libre, viendraient de temps en temps passer quelque temps ici. Gaillard venait d'être nommé inspecteur des Finances ; sa fonction l'autorisait à se déplacer librement jusqu'à la ligne de démarcation.

Il me présenta une seconde requête : accepterais-je de lui servir de correspondant entre Paris et les réseaux bretons de Résistance ? C'est ainsi que je devins son facteur. Je recevais des plis de lui ou de son homme de confiance, Fontaine. Un jour j'appris incidemment l'existence, dans cette affaire, d'un autre inspecteur des Finances, un certain Chaban, qu’on appelait parfois Delmas.

Un beau matin, en ouvrant les persiennes, j'aperçois des casques allemands et des canons de mitraillette luisant dans le soleil levant. J'ai feint de n'avoir rien remarqué et, rentrant dans la pièce, j'ai dit à ma femme de jeter dans le feu tous les papiers. L'investissement des maisons était général, nous nous sommes retrouvés, tous les hommes de quinze à soixante ans, réunis sur la place publique, devant la fontaine dédiée à saint Nicolas. Il fallut décliner les identités et répondre à un interrogatoire. Ma présence ne manqua pas de surprendre :

– Vous êtes Iranien ? Que faites-vous ici ?

C'était, ma foi, simple à expliquer, mais pas à un occupant méfiant : dans un village de Bretagne on n'aurait dû trouver que des Bretons, à la rigueur un ou deux Français d'une autre province, certainement pas un sujet du Shâh d'Iran !

– Vous vous expliquerez à la Kommandantur.

Se trouvait parmi nous le directeur d'un hôtel, Monsieur Bertrand, celui à qui je remettais les lettres que me donnait Gaillard. Si on arrivait à le faire parler, mon compte était bon, mais il ne prononça aucun mot.

Il fut déporté avec son fils âgé de dix-sept ans et une douzaine d'autres personnes. On ne les a jamais revus. Il semble que ce soit un jeune Américain de vingt ans, Donald, lequel avait opté pour la nationalité française, qui eût révélé aux Allemands les activités de résistance se déroulant à Saint- Nicolas-du-Pélem. Elles étaient intenses ; il avait même été nécessaire à un certain moment de cacher un parachutiste américain qui était resté accroché sur le clocher de l'église. Comme il était du plus beau noir, le dissimuler au reste de la population tenait de la performance !

Il arriva aussi qu'un de mes contacts fût pris par la Gestapo ; il ne connaissait pas mon nom mais pouvait facilement me désigner ou indiquer mon signalement, ce qu'il ne fit pas. Je n'affirme pas que j'aurais été fusillé, mais on m'aurait certainement envoyé dans un camp, comme Monsieur Bertrand. En participant à ces travaux clandestins, je me suis initié aux règles du jeu ; elles me serviront plus tard en Iran et même sous la dictature de Khomeiny. S'il me faut faire une comparaison, les agissements de la Gestapo étaient plus corrects que ceux de Khomeiny : si un résistant était fusillé, elle ne s'en prenait pas à son frère. Tel n'est pas le cas en République islamique[3].

Comme on le constate, c'est très naturellement que j'ai donné dans ce combat des ombres. Je ne pouvais pas être pétainiste car je suis anti-défaitiste. Cela dit, j'ai la ferme conviction qu'on ne peut prononcer le mot de trahison à propos de Pétain. Il a voulu sauver ce qui pouvait l'être, il est très difficile de le juger. Mon jugement n'a rien à voir avec les opinions politiques, c'est un jugement d'homme examinant sereinement le comportement d'un autre homme. Je pense aussi qu'à plus de quatre-vingts ans, on ne se met pas en tête de donner une nouvelle Constitution à son pays.[4] Une de mes voisines de la rue de l'Assomption, Madame Martin, me disait à propos du Maréchal : « Ce n'est pas un vieillard, c'est un vieillard vieux. » Elle en avait, elle, soixante-quinze.

Vers la fin de la guerre, les activités de résistance avaient atteint, à Saint-Nicolas-du-Pélem, un degré inimaginable. J'ai cru ma dernière heure arrivée un jour que je revenais de Saint-Brieuc, 80 kilomètres à pied aller-et-retour. Chemin faisant, j'avais bu une bolée de cidre dans un café ; peu après j'étais interpellé par un grand brun armé de pied en cap, qui surgit d'un talus, disposé à m'abattre séance tenante. On m'avait vu parler, disait-il, dans le bistrot, avec un personnage sur lequel on avait plus que des soupçons. Si je ne livrais pas son nom, j'étais un homme mort.

N'ayant pas le souvenir d'avoir parlé à quiconque ni fait le moindre clin d'œil même à une jolie Bretonne, je ne voyais pas comment me tirer d'affaire. Heureusement ce matamore de chemin creux avait un camarade plus âgé et plus sensé, qui débucha tout à coup :

– Viens par ici.

Je dus répondre à un flot de questions, ils estimèrent que Bakhtiar était un nom italien, ce qui apparemment aggravait mon cas. Ma valise était remplie de chaussettes d'enfant destinées à être détricotées pour un nouvel usage. Ceci me servit de circonstance atténuante ; le traître se transformait en père de famille cherchant à survivre. Nous pûmes dialoguer d'une façon plus détendue et j'appris que mes agresseurs n'étaient pas des miliciens de Vichy, comme je l'avais supposé, mais des Résistants. Après avoir échappé à la Gestapo, j'avais manqué de périr d'une balle parachutée par les Alliés.

– Très bien, tire-toi. Si tu es arrêté par les nôtres, tu diras : « Récolte 43 ».

– Qu'est-ce que c'est ?

– Le mot de passe.

J'ai toujours retenu ce mot de passe ; dans des circonstances difficiles de ma vie, il m'est arrivé de me murmurer à moi-même, pour chasser les idées noires : « Récolte 43 ». »[5]

Il obtient en 1945 à la Sorbonne plusieurs diplômes de droit et de philosophie et un doctorat de sciences politiques avec une thèse sur les relations entre l'Église et l'État dans le monde classique, avant de retourner en Iran en 1946 et d’entamer une carrière politique qui le conduira à devenir plus tard Premier ministre, comme son grand-père maternel Najaf Gholi Khân Bakhtiâri Samsam os-Saltâneh avant lui, en 1912 et 1918.

 

  1. Un Juste parmi les Nations oublié et méconnu : Abdol-Hossein Sardari, le « Schindler iranien »
  1. Abdol-Hossein Sardari, consul d’Iran à Paris

Né à Téhéran en 1914, Abdol-Hossein Sardari, d’origine azérie, appartient à la famille royale qâdjâre. Cependant, les évènements qui portent Rezâ Shâh Pahlavi au trône d’Iran laissent sombrer la famille qâdjâre dans une situation sociale des plus quelconques.  Abdol-Hossein Sardari se tourne alors vers des études de droit à l’université de Genève et obtient son diplôme en 1936. Il poursuit une carrière de diplomate qui le conduira à assumer les fonctions de consul d’Iran à Paris en 1940.

Devant l’avancée de l’armée allemande et leur entrée dans Paris, de nombreuses ambassades sont transférées dans les villes où se replie le gouvernement français pour finalement s’installer à Vichy lorsque les zones de démarcation seront établies. L'ambassadeur iranien Anoushirvân Sepâhbodi reconstitua l'ambassade d’Iran à Vichy et laissa Sardari responsable des affaires consulaires à Paris. A partir de novembre 1941, consécutivement à l’invasion de l’Iran par les Soviétiques et les Britanniques en août, les intérêts iraniens dans l’ensemble des pays occupés par les forces allemandes seront représentés par les diplomates suisses, chargés de la sorte des recours déposés par les Iraniens de confession juive.

Une importante communauté d’Iraniens de confession juive habitait Paris sans que les lois nazies ne puissent les concerner : en effet, la doctrine nationale-socialiste considérait les Iraniens comme des « Aryens de sang pur » depuis les lois de Nuremberg proclamées en 1935. De la sorte, les Juifs iraniens furent sauvés de la déportation et de l’extermination consécutive. Insistant sur ces lois raciales, Sardari parvint à convaincre nombre d’officiels nazis que les Juifs iraniens n’appartenaient guère à la « race ennemis » des Aryens et qu’ils devaient être traités de manière égale aux musulmans. Sardari peut ainsi aider dans un premier temps plus de 1000 familles juives iraniennes à quitter la France pour se réfugier en Iran ou dans d’autres pays plus sûrs.

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Abdol-Hossein Sardari, consul d’Iran à Paris pendant la Seconde Guerre mondiale.

  1. Le sauvetage des Djougoutes à Paris

Devant la menace se profilant à l’encontre des Juifs iraniens, Abdol-Hossein Sardari intervient auprès des autorités françaises en octobre 1940 afin de protéger les Djougoutes en adressant le 29 octobre une lettre portant l’en-tête du Consulat impérial d’Iran aux autorités françaises de Vichy leur rappelant que les Djougoutes ne devaient point être considérés semblablement aux Juifs :

« Selon une étude ethnographique et historique relative aux communautés religieuses juives de race non-juive en Russie reçue par le présent consulat et validée par l'Ambassade allemande à Paris le 28 octobre 1940, les Juifs autochtones (djougoutes) des territoires des anciens khanats de Boukhara, de Khiva et de Khokand (qui font actuellement partie des Républiques soviétiques d'Ouzbékistan et du Tadjikistan) doivent être considérés comme étant de même origine ethnique que ceux de Perse.

Selon cette étude, les Djougoutes d'Asie centrale appartiennent à la communauté juive uniquement en raison de leur observance des principaux rites du judaïsme. En vertu de leur sang, de leur langue et de leurs coutumes, ils sont assimilés à la race autochtone et proviennent de la même souche biologique que leurs voisins, les Perses et les Sartes (Ouzbeks). »

Les Djougoutes sont des descendants d’Iraniens juifs convertis de force à l’Islam en 1838 mais continuant secrètement la pratique du culte judaïque. Les papiers d’identités officiels les assimilent à des musulmans, des Iraniens non-juifs en raison de leur culture et de la mixité de leurs mariages.

Dirigée par le docteur Asaf Atchildi, médecin originaire de Samarcande, en Ouzbékistan, la communauté djougoute de Paris est régulièrement confondue et visée par la police avec les Juifs, comme Atchildi le rappelle dans ses mémoires publiées en 1965. La plupart de ces confusions proviennent de l’enregistrement  par les services de police français de certains Djougoutes comme étant juifs. Beaucoup craignent alors d’être arrêtés, tel les six Djougoutes arrêtés et internés au camp de Drancy en été 1941 ; Atchildi déclare d’ailleurs dans ses mémoires que certains d’entre eux seront retenus en otages en représailles à des actes de résistance à l’encontre des Allemands. Au début du mois de février 1942, les autorités allemandes adressent à la Préfecture de Police de Paris un document attestant l’exemption des Djougoutes aux lois sur le statut des juifs décrétées par l’Etat français. Le docteur Atchildi obtient en conséquence la libération de deux Djougoutes, avec l’aide de Julien Kraehling, avocat au Barreau de Mulhouse. Ce dernier fait parvenir un courrier aux chefs des familles boukhariotes de Paris le 23 août 1941, trois jours après les premières rafles. Cette lettre nous est rapportée dans l’ouvrage Journal de Nathan Davidoff. Le Juif qui voulait sauver le Tsar[6].

« Monsieur Mayer Davidoff

Monsieur,

J’ai l’honneur, en vous joignant la copie de la lettre der Beauftracte des Militarbefehlshaber in Frankreich auprès du Service de Contrôle des Administrateurs Provisoires du 22 août – Az : II/41 A/P., de vous confirmer que d’après l’entretien que j’ai eu le 22 août 1941 avec le Délégué du Militarbefehlshaben in Frankreich près le Commisariat aux Affaires Juives, le dossier de la communauté djougoutes a été envoyé à l’Institut Racial de Berlin pour une décision motivée et définitive tendant à établir que les Djougoutes soient considérés comme non-juifs. En attendant cette décision, il a ordonné qu’aucune mesure grave ne soit appliquée aux membres de la communauté djougoute à Paris.

Je vous prie de croire Monsieur, à l’assurance de mes sentiments distingués.

Signé : Julien Kraehling, Avocat au Barreau de Mulhouse »

Le 11 février 1942, Atchildi reçoit une lettre de Abdol-Hossein Sardari lui demandant d’insérer dans la liste des Djougoutes présents en France les noms de Juifs iraniens avant de remettre cette dernière aux autorités françaises. De son côté, Sardari s’adresse directement aux autorités allemandes en leur adressant deux lettres le 29 septembre 1942 et le 17 mars 1943 concernant le statut des Juifs iraniens : l’objectif est de les préserver de toute arrestation pouvant conduire à une déportation. Pour cela, le consul n’hésite pas à reprendre les termes de la propagande nazie, en déclarant dans sa seconde lettre que les Djougoutes détiennent en Iran « tous les droits et les devoirs civils, légaux et militaires au même titre que les musulmans » et en expliquant avec maints détails l’assimilation de cette minorité parmi la population iranienne et leur utilisation de la langue persane plutôt que le yiddish ou l’hébreu.

Le 4 mai 1943, Atchildi remet au Commissariat général aux questions juives une liste comprenant les noms de 41 Iraniens parmi les 91 personnes répertoriées comme des Djougoutes originaires d'Iran, d'Afghanistan et de Boukhara et résidant en région parisienne.  Les Djougoutes seront définitivement exemptés de l’application des lois sur le statut des Juifs au printemps 1943 par les Allemands, puis par l’Etat français quelques semaines après, récompensant ainsi les efforts du consul Sardari, du docteur Atchildi, du maître Kraehling et des diplomates helvètes. Presque tous les Djougoutes survivront jusqu’à la fin de la guerre.

  1. Délivrance de passeports

A partir de 1942 se dessine le projet de la « solution finale », à savoir l’extermination des Juifs par des méthodes de mise à mort industrialisées comme les chambres à gaz. Abdol-Hossein Sardari, prenant conscience de l’ampleur du dispositif, décide de délivrer des passeports iraniens à plusieurs familles juives mais non iraniennes sans mentionner sur les documents leur religion et sans avoir reçu la moindre autorisation légale de son gouvernement. Il va même jusqu’à cacher les biens d’un antiquaire dans les caves de l’ambassade ; les Allemands partis, le consul contactera cet antiquaire pour qu’il vienne récupérer ses biens. Sardari refusera d’ailleurs de rentrer en Iran lorsque le ministère iranien des Affaires étrangères le rappellera et restera en poste en France jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale avant d’être chargé d’affaire à Bruxelles jusqu’en 1952. Plus de 2000 familles juives obtiendront un passeport grâce à ses efforts et pourront être sauvées.

  1. Après la guerre

L’Histoire va oublier Abdol-Hossein Sardari qui va peu à peu sombrer dans l’anonymat. Fiancé à la chanteuse d’opéra chinoise Tchin Tchin, il doit supporter sa mort tragique en 1948 alors qu’elle se rend en Chine en proie à la guerre civile pour demander à ses parents l’autorisation de l’épouser. Lorsqu’il retourne à Téhéran en 1952, Sardari est accusé de faute pour la délivrance sans autorisation de nombreux passeports iraniens durant son consulat parisien. Il ne réussit à clarifier sa situation qu’en 1955, avant de prendre sa retraite du Corps diplomatique et de rejoindre la Compagnie nationale iranienne du pétrole.

Interrogé par le musée Yad Vashem en avril 1978 à propos de son action à Paris durant la Seconde Guerre mondiale, Sardari répondra : « Comme vous le savez peut-être, j'ai eu le plaisir d'être le consul iranien à Paris sous l'Occupation allemande de la France et, à ce titre, il était de mon devoir de sauver tous les Iraniens, y compris les Juifs iraniens ».

Abdol-Hossein Sardari était également l’oncle du Premier ministre Amir Abbas Hoveida, qui sera fusillé lors de la Révolution de 1979, et de l’ancien ambassadeur iranien aux Nations-UniesFereydoun Hoveyda, qui vécut d’ailleurs à ses côtés en 1942 et témoigna du rôle de son oncle. Sardari décède à Nottingham, près de Londres, en 1981.

 

  1. Les réfugiés polonais en Iran durant la Seconde Guerre mondiale
  1. Le contexte historique en Pologne

L’armée allemande envahit la Pologne le 1er septembre 1939, déclenchant ainsi la Seconde Guerre mondiale en Europe. Suivie par l’armée soviétique qui pénètre en Pologne le 17 septembre, l’armée polonaise, incapable de contenir les armées allemande et soviétique malgré quelques îlots d’héroïque résistance, est vaincue le 6 octobre. Dès lors, en vertu du pacte Molotov-Ribbentrop, du nom des ministres des Affaires étrangères soviétique et allemand, la Pologne est partagée : la moitié occidentale, dont certains territoires sont annexés au Reich allemand, est gouvernée par un gouvernement général sous contrôle allemand et la moitié orientale est annexée par l’Union soviétique. Ainsi plusieurs millions de Polonais passent sous les autorités allemandes ou soviétiques.

Durant cette occupation, les Soviétiques ne déportent  pas moins de 1,25 million de Polonais partout en Union soviétique. Cependant, ce chiffre n’est qu’une estimation puisque le nombre exact des victimes d’exécutions, notamment politiques, n’est pas connu. Parmi les Polonais déportés, environ 500 000 civils sont considéré par les autorités communistes comme « éléments antisoviétiques » et « socialement dangereux » ; ces derniers seront déportés vers des camps de travail situés au Kazakhstan ou en Sibérie. Il s’agit souvent de fonctionnaires, de juges, de membres des forces de police, de travailleurs forestiers, de colons, de petits agriculteurs, de commerçants, mais également de réfugiés venus de Pologne occidentale, d’enfants de camps de vacances et d'orphelinats, des membres de famille de personnes arrêtées, disparues ou évadées à l’étranger. Leur situation dans les camps soviétiques s’avérait terrifiante et nombre de ces déportés désormais emprisonnés mouraient d’épuisement au travail ou de malnutrition qu’aucune aide médicale ne pouvait endiguer.

Les Soviétiques vont occuper leur partie de la Pologne pendant presque deux ans, jusqu’à l’offensive allemande Barbarossa lancée le 22 juin 1941 dans le but d’envahir l’Union soviétique. Cette attaque allemande qui rompt en conséquence le pacte germano-soviétique va permettre aux Polonais de se réorganiser. Le 30 juillet 1941, le général Wladyslaw Sikorski, alors Premier ministre polonais en exil, et l’ambassadeur soviétique au Royaume-Uni Ivan Mayski signent un accord baptisé Sikorski-Mayski qui invalide les dispositions territoriales émises par le pacte Molotov-Ribbentrop. Cet accord permet le rétablissement de l'État polonais, l'amnistie des prisonniers de guerre polonais en Union soviétique et surtout la création d'une armée polonaise sur le sol soviétique que commandera le général polonais Wladyslaw Anders, nouvellement libéré de la prison Loubianka à Moscou en août 1941. Cependant, l’armée polonaise reconstituée manque de nourriture et ses soldats sont pour la plupart d’anciens déportés que l’emprisonnement a fortement affaiblis lorsqu’ils ne sont pas morts.

  1. L’évacuation des réfugiés polonais en Iran

La situation en Iran n’est guère des plus agréables après l’invasion anglo-soviétique de 1941 : les Soviétiques ayant interdit le transfert de riz dans les parties centrale et méridionale du pays, provoque de la sorte une famine et une inflation croissante du prix des denrées alimentaires dans un pays déjà souffrant économiquement, les ressources nécessaires à l'effort de guerre comme les chemins de fer, les transports, les industries manufacturées ayant été placées sous le contrôle des Britanniques. Les Soviétiques décident de déplacer les Polonais combattants, pour la plupart abandonnés à leur sort, et les Polonais non-combattants, c’est-à-dire les réfugiés polonais non-militaires, les femmes et les enfants, dans des zones lointaines des combats, après la mer Caspienne.

Les premiers réfugiés polonais arrivent en Iran en mars 1942 par la ville portuaire de Pahlevi, connue aujourd’hui sous le nom d’Anzali. Devenue le point de débarquement le plus important, Pahlevi accueille jusqu’à 2500 réfugiés par jour. Au total, plus de 116 000 réfugiés polonais rejoindront l’Iran en 1942, dont environ 74 000 soldats et 41 000 civils parmi lesquels 5000 à 6000 étaient Juifs. Ayant souffert pendant deux années durant lesquelles se côtoyèrent la famine, les maladies causées par la malnutrition ou d’autres comme le paludisme, les fièvres et le typhus, les Polonais passent plusieurs jours en quarantaine dans des entrepôts portuaires de Pahlevi avant d’être envoyés à Téhéran. Le manque de nourriture laissant place à une nourriture enfin accessible, plus d’une centaine de réfugiés dont beaucoup d’enfants mourront de dysenterie aiguë consécutive à une soudaine alimentation excessive. De nombreux autres décèderont des suites de leurs maladies et de leur malnutrition à peine arrivés en Iran ; ils sont inhumés au cimetière arménien de Pahlevi.

Vidéographie des informations intitulée Poles in Persia datant de 1942.

Devant l’affluence des réfugiés polonais à Téhéran, les autorités durent réquisitionner des centres gouvernementaux pour les accueillir. Les militaires polonais furent quant à eux envoyé dans les centres de formation de Kirkouk et Mossoul, tous deux situés en Irak, avant de rejoindre les forces alliées dans la campagne d’Italie lancée en juin 1943.

Plusieurs milliers d’enfants orphelins ou ayant été séparés de leurs parents pendant les déportations successives seront envoyés dans des orphelinats iraniens, principalement à Mashhad et Ispahan en raison des conditions climatiques propices à la convalescence et au rétablissement. On estime à environ 2000 le nombre d’enfants polonais ayant séjourné entre 1942 et 1945 à Ispahan, se parant en cette période du surnom de « ville des enfants polonais ».

Cependant, l’Iran ne disposait pas des ressources et des infrastructures nécessaires pour accueillir durablement autant de réfugiés. La Grande-Bretagne canalisa à partir de l’été 1942 cet afflux migratoire massif en envoyant des réfugiés polonais dans ses diverses colonies : l’Inde, l’Ouganda, le Kenya et l’Afrique du Sud furent les principales destinations ; le gouvernement mexicain accepta également d’accueillir plusieurs milliers de Polonais.

  1. La présence polonaise en Iran et l’accueil exemplaire des Iraniens

Certains réfugiés polonais choisirent de rester en Iran après la guerre, ayant retrouvé un équilibre de vie en travaillant ou en se mariant avec des Iraniens ou des Iraniennes. En dépit des nombreuses difficultés économiques qui touchaient l’Iran depuis son invasion par les Soviétiques et les Britanniques, les Iraniens ont chaleureusement accueilli les Polonais venus trouver refuge et le gouvernement iranien mit en place diverses mesures afin de leur fournir les soins et les provisions nécessaires. De plus, il développa une politique d’accueil pour que les Polonais puissent se sentir à leur aise, qui se manifesta par la construction d’écoles et d’organisations éducatives et culturelles dans lesquelles le persan aussi bien que le polonais furent enseignés, de même que l’histoire et la géographie iraniennes et polonaises. Des magasins, des boulangeries, des entreprises ainsi que des agences de presse polonaises furent créés.

Avec le temps, la plupart des vestiges de cette présence polonaise en Iran se sont estompés. Cependant, avec les décès de près de 3000 réfugiés au cours des premiers mois suivant leur arrivées, de nombreux cimetières abritent des sépultures aujourd’hui encore entretenues et sur lesquelles les noms sont inscrits en polonais. Par exemple, le cimetière catholique de Doulab, à l’est de Téhéran, comporte 1937 tombes polonaises, ainsi que 56 tombes juives sur lesquelles figure l’étoile de David.

En 1983, le réalisateur iranien Khosrow Sinâï[7] présenta un documentaire intitulé Le Requiem perdu consacré aux 300 000 réfugiés polonais en Iran pendant la Seconde Guerre mondiale.

 

La Seconde Guerre mondiale en Iran – Première partie

La Seconde Guerre mondiale en Iran – Troisième partie


[1] Shâpour Bakhtiâr, Yekarnagi (Ma Fidélité), éditions Khâvarân, Téhéran, 1982, p. 31.

[2] Shâpour Bakhtiâr, extraits de Ma fidélité, éditions Albin Michel, 1982, pour la France et éditions Khâvarân, 1982, pour l’Iran.

[3] Nous pouvons déceler dans ces propos une certaine rancœur vis-à-vis de la révolution qui l’a chassé du pouvoir seulement trois années avant la parution de son ouvrage.

[4] Il nous a paru intéressant de souligner cette citation : serait-ce un tacle adressé à l’ayatollah Khomeyni, justement âgé de 77 ans en 1979 et prenant le pouvoir pour instaurer une nouvelle Constitution en Iran ?

[5] Cf. note précédente.

[6] Journal de Nathan Davidoff. Le Juif qui voulait sauver le Tsar, éditions Ginkgo, 2002, p. 171.

[7] Né le 19 janvier 1941, Khosrow Sinâï décède de la covid-19 le 1er août 2020. Il fut élevé au rang de chevalier de l’ordre du mérite de la République de Pologne en 2008.